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Algoneurodystrophie paranéoplasique : description d’un cas. Des oedèmes qui tiennent tête - 19/12/20

Doi : 10.1016/j.revmed.2020.10.361 
J. Liberatore 1, , M. Dufrénoy 1, I. Caballero 2, M. Martin 1, S.D. Odile 1
1 Médecine interne, CHU de Poitiers, Poitiers 
2 Neurologie, CHU de Poitiers, Poitiers 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Le syndrome d’algoneurodystrophie (ou syndrome douloureux régional complexe) associe de manière localisée autour d’une ou plusieurs articulations une hyperalgésie, un enraidissement progressif, des troubles vasomoteurs. Quasi exclusivement unilatéral, et le plus souvent secondaire à un traumatisme, il reste idiopathique dans 10 à 25 % des cas. Nous rapportons ici le cas d’une algoneurodystrophie paranéoplasique.

Observation

Une femme de 46 ans, aux antécédents de tumeur bénigne du sein gauche, tabagique active à 20 PA, se présentait aux urgences pour apparition récente de céphalées non pulsatiles, parfois accompagnées de nausées et de baisse d’acuité visuelle. Le scanner cérébral sans injection était sans particularité. Un traitement par kétoprofène, métoclopramide, et une association de codéine et paracétamol étaient introduit, d’efficacité partielle. Dans le même temps, la patiente présentait des œdèmes douloureux des membres inférieurs, bilatéraux, prenant le godet, avec impotence fonctionnelle totale, sans facteur déclenchant. Les jambes étaient inflammatoires, chaudes, rouges, avec allodynie. L’examen neurologique était normal. Les antalgiques de palier II, la pregabaline, et la gabapentine étaient inefficaces. Le bilan étiologique éliminait un syndrome néphrotique, une insuffisance cardiaque ou hépatique, une hypoalbuminémie, une dysthyroïdie. Le bilan auto-immun était négatif. L’hypothèse iatrogène était exclue au vu de la chronologie des évènements. Les radiographies des chevilles étaient normales. L’échographie des chevilles mettait en évidence une infiltration sous-cutanée des chevilles, sans épanchement intra-articulaire. L’électroneuromyogramme était sans anomalie. La scintigraphie osseuse mettait en évidence une hyperhémie des deux chevilles et des articulations métatarso-tarsiennes, compatible avec une algoneurodystrophie bilatérale en phase chaude. Concernant les céphalées, la ponction lombaire retrouvait une discrète hyperprotéinorachie à 0,63g/L, isolée, non significative, sans élément blanc. L’examen ophtalmologique était normal. L’IRM cérébrale mettait en évidence une lésion vasculaire à type d’angiome veineux, avec prise de contraste nodulaire et hypersignal de la substance blanche cérébello-vermienne, en faveur d’un œdème. Ces anomalies faisaient évoquer une lésion secondaire. Le TEP-scanner révélait une image suspecte de lésion primitive en projection de la bronche souche droite, sans signe d’extension régionale ou à distance. Après cytoponction par écho endoscopie de la lésion bronchique, on identifiait une lésion tumorale indifférenciée. La biopsie de la lésion cérébrale révélait une métastase d’un carcinome. Malgré des discordances entre les marqueurs anatomopathologiques de la lésion considérée primitive et la métastase, on concluait à une variante rare de carcinome non à petites cellules, de type NUT, stade pT2aN1M1. Une lobectomie supérieure droite ainsi qu’une résection de la métastase cérébelleuse ont été réalisées, permettant une régression immédiate des douleurs des membres inférieurs.

Discussion

L’algodystrophie paranéoplasique est une cause rare de syndrome douloureux régional complexe, et doit être évoquée devant un tableau atypique, notamment lors d’une atteinte bilatérale ou en l’absence de facteur déclenchant. Elle peut s’associer à des tumeurs malignes de différents types. Une quarantaine de cas de syndromes paranéoplasiques de présentation rhumatologique, telle que la fasciite palmaire, ou la polyarthrite, ont été décrits, pouvant s’associer notamment aux cancers épidermoïdes du poumon, mais aussi de l’ovaire, du côlon, du pancréas, ou des leucémies myéloïdes. L’intervalle entre l’apparition des signes rhumatologiques et le diagnostic de la tumeur associée dépasse rarement les 2 ans. La physiopathogénicité de ces syndromes paranéoplasiques demeure incertaine, elle impliquerait un processus inflammatoire par la libération de médiateurs cytokiniques par les cellules tumorales, ainsi qu’une réaction d’hypersensibilité aux antigènes produits par la cellule tumorale ou par ses débris apoptotiques. À notre connaissance, il s’agit du premier cas décrit présentant une amélioration de l’algodystrophie après prise en charge de la néoplasie. La chronologie est ici très en faveur d’un lien de cause à effet entre la néoplasie et le syndrome douloureux régional complexe.

Conclusion

Les syndromes paranéoplasiques de présentation rhumatologique, tel que l’algodystrophie paranéoplasique, sont rares. Une présentation atypique d’algodystrophie devrait orienter le clinicien vers un dépistage néoplasique. Le traitement oncologique semble améliorer les symptômes en lien avec l’algodystrophie.

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Vol 41 - N° S

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